
Un dirigeant de PME nous a récemment raconté une scène brutale : deux mois avant d’ouvrir un process de cession, son directeur commercial – pilier de l’entreprise depuis dix ans – dépose sa démission. Pas de conflit, pas de signe annonciateur. Juste l’usure, l’envie d’ailleurs. Résultat : un pipeline commercial fragilisé, un climat interne tendu… et des acquéreurs qui ont immédiatement revu leur perception du risque.
Ce n’est pas un cas isolé. Entre 2025 et 2028, de nombreuses PME vont se heurter à un phénomène sous-estimé : la fuite silencieuse des managers clés. Une dynamique qui pèse directement sur la transmissibilité, la valorisation et la confiance des repreneurs.
Dans les PME, les managers clés sont souvent les « co-pilotes informels » du dirigeant : ils connaissent tout, compensent les zones de flou, absorbent les urgences. Cette fidélité crée paradoxalement un angle mort : le dirigeant pense qu’ils sont indéplaçables… jusqu’au jour où ils partent.
Le cas typique : un responsable opérationnel qui porte à lui seul la relation avec les meilleurs clients, un directeur technique qui détient les process « non écrits », ou un manager atelier capable de résoudre en quinze minutes un problème qui paralyserait l’entreprise.
Chez Scale2Sell, nous voyons régulièrement des PME parfaitement rentables mais dont la valeur perçue chute instantanément lorsque l’acquéreur réalise que deux ou trois personnes détiennent 70% du savoir opérationnel. Le risque devient trop élevé, la négociation se durcit, parfois le deal s’arrête.
Les années 2025–2028 seront marquées par une tension accrue sur les compétences intermédiaires : chefs d’équipes, managers de production, responsables commerciaux sectoriels. Dans certains secteurs (industrie, BTP, santé, IT), les départs non anticipés augmentent de 20 à 35% selon les études sectorielles.
Les acquéreurs, eux, se montrent plus exigeants : ils scrutent les organigrammes, les taux de turnover, la seniorité, et surtout le « risk mapping humain ». Leur lecture est simple : moins il existe de cadres intermédiaires autonomes, plus la PME est considérée comme dépendante du dirigeant… donc risquée.
Les fonds de reprise appliquent désormais des décotes de 10 à 20% lorsque la structure managériale repose sur moins de trois personnes réellement autonomes. Dans le mid-market, les deals se gagnent ou se perdent sur cette lecture RH, beaucoup plus qu’on ne veut l’admettre.
Voici les cinq erreurs qui reviennent le plus souvent :
1. Penser que la fidélité suffit.
La loyauté d’un manager ne compense pas l’absence de perspective. Résultat : démission surprise, perte de savoir critique, choc organisationnel.
2. Ne pas documenter les rôles informels.
Quand « c’est Pierre qui s’en occupe » devient un modèle organisationnel, l’acquéreur voit une bombe à retardement.
3. Confondre agilité et absence de process.
Une PME qui fonctionne « à l’instinct » peut être performante au quotidien… mais fait peur en due diligence.
4. Rester dans l’hyper-centralisation.
Le dirigeant continue de porter toutes les décisions clés. Les managers s’essoufflent, le repreneur identifie la dépendance.
5. Reporter les sujets RH difficiles.
Un manager clé usé mais laissé en place par confort peut dégrader toute la culture d’entreprise.
Posez-vous la question que se posera immanquablement un repreneur : « Si deux personnes partent demain, que reste-t-il ? » Cette démarche oblige à cartographier les risques humains, les compétences critiques, les dépendances invisibles.
Il ne s’agit pas de créer un organigramme artificiel, mais de :
• répartir réellement la prise de décision,
• formaliser les process clés, même de manière simple,
• créer des postes intermédiaires qui existent « sur le papier et dans la vraie vie »,
• ritualiser les réunions opérationnelles pour que tout ne passe plus par le dirigeant.
L’expérience de Scale2Sell montre qu’une PME qui documente 20% de ses process prioritaires devient immédiatement plus lisible, donc plus valorisable.
La question n’est pas de savoir si vos managers clés vont partir. La question est : « S’ils partent, l’entreprise tient-elle sans choc ? » Une préparation efficace inclut :
• un plan de continuité managériale,
• un programme de montée en compétences des seconds couteaux,
• un plan de fidélisation aligné avec la trajectoire de sortie,
• la gestion proactive des signaux faibles (fatigue, charge, stagnation).
Il existe quelques signaux très clairs :
• un ou plusieurs managers commencent à se protéger, réduire l’effort, se désengager silencieusement,
• les décisions prennent plus de temps car les relais ne suivent plus,
• les équipes expriment indirectement leur fatigue ou leur besoin de clarté,
• le dirigeant se retrouve à « reprendre » des sujets qu’il pensait délégués,
• la croissance ralentit non pas par manque d’opportunités, mais par manque de bande passante managériale.
Le bon moment, c’est l’alignement entre la maturité de l’entreprise, la disponibilité du marché… et l’envie profonde du dirigeant d’ouvrir un nouveau chapitre.
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La fuite silencieuse des managers clés n’est pas un phénomène marginal : c’est l’un des risques les plus sous-estimés dans les PME. Il fragilise la valorisation, complique les processus de cession et peut éroder des années de travail stratégique. La seule réponse efficace est la structuration proactive : clarifier les rôles, documenter, déléguer, sécuriser.
Une entreprise est reprenable quand elle repose sur un système, pas sur des personnes isolées.
Chez Scale2Sell, nous accompagnons les dirigeants pour structurer leur organisation, réduire les angles morts humains et rendre leur entreprise réellement désirable aux yeux des acquéreurs.

François Joseph Viallon est cofondateur de Scale2Sell, où il accompagne des dirigeants dans leur passage à un nouveau palier de croissance jusqu’à la cession de leur entreprise.
Entrepreneur dans l’âme, il a fondé et dirigé StarDust, une société internationale spécialisée dans le test d’applications mobiles, qu’il a menée jusqu’à sa cession.Fort de cette expérience, il partage aujourd’hui les enseignements – succès comme erreurs – de son parcours pour aider d’autres dirigeants à structurer, valoriser et transmettre leur entreprise dans les meilleures conditions.
Il est également l'animateur du podcast Les interviews Scale2Sell et du programme d’accompagnement One Step Forward, pensé pour les dirigeants qui veulent anticiper et réussir leur transition.
François croit profondément à l’impact d’un collectif d’experts engagés, au service de dirigeants prêts à franchir une nouvelle étape.
François est papa de 2 garçons de 11 et 12 ans, il est basé à Marseille et en Haute-Savoie.

Sandrine Montel est Partner Finance chez Scale2Sell. Elle accompagne les dirigeants dans la structuration de leur pilotage financier, la maîtrise de leur rentabilité et la préparation aux grandes étapes de transformation : accélération de la croissance, levée de fonds ou cession.
Avec plus de 20 ans d’expérience en direction financière dans des PME et ETI, Sandrine combine une approche stratégique, une capacité d’analyse pointue et une forte orientation terrain. Elle a accompagné de nombreuses entreprises dans la mise en place d’outils de gestion performants, le dialogue avec les investisseurs, ou encore la sécurisation de leur trésorerie dans des phases critiques.
Chez Scale2Sell, elle agit comme un véritable bras droit financier des dirigeants, en les aidant à prendre des décisions éclairées, fiables et tournées vers la création de valeur.
Sandrine croit profondément que la rigueur financière n’est pas une contrainte, mais un moteur de sérénité et d’impact pour les dirigeants.
Elle vit entre Lyon et Bordeaux, et partage son énergie entre ses missions de conseil, l’accompagnement de jeunes talents de la finance… et son potager bio, qu’elle cultive avec autant de méthode que ses plans de trésorerie.
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