Comment valoriser une marque agroalimentaire ?

Comment valoriser une marque agroalimentaire ?
May 4, 2025

Valoriser une marque agroalimentaire en phase de cession ou de levée de fonds exige une analyse beaucoup plus fine que l’application de multiples standards. Les acquéreurs – industriels, fonds ou groupes familiaux – scrutent aujourd’hui trois dimensions clés : la solidité du positionnement, la résilience économique face aux tensions du secteur, et la capacité de la marque à se différencier durablement.

Les spécificités de la valorisation des marques agro en PME/ETI

Dans l’agroalimentaire, la valeur d’une marque dépend autant de sa demande consommateur que de sa capacité à supporter les pressions structurelles du secteur. Les multiples observés dans l’agro suivent les tendances du mid-market, mais les variations entre segments restent fortes.

Dépendance aux circuits de distribution

La majorité des PME agroalimentaires sont exposées aux centrales d’achat. Cette dépendance augmente la sensibilité de la marque aux négociations annuelles, ce qui influence directement les marges et donc la valorisation. Une marque avec un mix GMS/CHR/B2B équilibré est mieux perçue car elle réduit son risque commercial.

Pression sur les coûts et volatilité matières premières

Les hausses successives des coûts – matières premières, énergie, transports, masse salariale – fragilisent les marges. Les acquéreurs valorisent particulièrement les entreprises capables de maîtriser leur structure de coûts ou de sécuriser leurs approvisionnements agricoles.

Différences fortes selon les catégories

Les marques premium, terroir ou snacking peuvent obtenir une prime si leur identité est forte et leur positionnement différenciant. À l’inverse, les segments bio subissent actuellement un recul de la demande. Aucune donnée récente ne permet de quantifier précisément l’écart de multiples entre catégories, mais les tendances influencent clairement l’appétit des repreneurs.

Les drivers qui influencent réellement les multiples à la cession

Lors d’un process de cession, les multiples appliqués reflètent la perception de risque et le potentiel de croissance. Les acquéreurs évaluent plusieurs leviers critiques.

1. Positionnement et mix produit

Un portefeuille équilibré, capable de résister aux arbitrages des ménages (montée des MDD, pression sur le pouvoir d’achat), augmente la valeur. Les marques premium avec ancrage local, identité forte ou savoir-faire spécifique bénéficient souvent d’un intérêt renforcé.

2. Marges et trajectoire de rentabilité

Les multiples mid-market européens se situent actuellement autour de 9 à 10 fois l’EBITDA, mais les PME agroalimentaires doivent démontrer leur résilience face aux surcoûts persistants. Une marge stable malgré la hausse des intrants est un signal très positif.

3. Innovation et capacité RSE

Les industriels comme les distributeurs favorisent désormais les marques capables d’innover rapidement, notamment sur les produits différenciants ou les process industriels. Une politique RSE claire améliore également la perception de risque.

4. Capacité industrielle et flexibilité

Les repreneurs valorisent les sites capables de monter en cadence, flexibles ou partiellement automatisés. Les investissements industriels ne sont pas chiffrés précisément par segment, mais la modernisation est systématiquement un argument valorisant.

Quels multiples appliquer réellement ?

Les multiples doivent être lus à la lumière des dynamiques sectorielles et des spécificités de la marque.

Multiples observés dans le mid-market européen

Entre 2023 et 2025, les valorisations des PME/ETI européennes ont fluctué entre 8,9x et 9,8x l’EBITDA, avec un pic fin 2024 suivi d’une légère correction début 2025. L’agro s’inscrit globalement dans cette tendance, avec des primes possibles pour les segments différenciants.

Exemples de profils de marques

  • Marques premium ou terroir à forte identité : possibilité de viser le haut de fourchette selon notoriété, distribution et marge.
  • Marques exposées aux MDD ou au bio : multiples généralement plus prudents en raison de la pression sur la demande.
  • PME sous forte dépendance GMS ou matières premières volatiles : décote liée au risque opérationnel.

Cas pratiques de valorisation : comment les écarts se creusent

Même avec un EBITDA similaire, deux marques agroalimentaires peuvent afficher des valorisations très éloignées selon leur exposition aux risques et leur capacité à se différencier.

Cas A : Marque premium à ancrage régional

  • Positionnement fort
  • Réseau GMS solide et présence CHR
  • Marge résiliente malgré inflation

→ Multiple potentiellement proche du médian du secteur mid-market.

Cas B : PME bio avec mix produit sous pression

  • Ralentissement de la demande
  • Dépendance GMS élevée
  • Sensibilité aux renegociations annuelles

→ Multiple nettement réduit en raison d’une perception de risque accrue.

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À retenir :

La valorisation d’une marque agroalimentaire ne dépend plus seulement de ses ventes ou de sa notoriété. Ce sont la résilience du modèle, la solidité du mix produit, la maîtrise des coûts et la différenciation qui déterminent aujourd’hui les multiples réellement obtenus en cession. Pour maximiser votre valeur, clarifiez votre positionnement, sécurisez votre rentabilité et préparez un dossier lisible pour les acquéreurs.

Remarques :

Les données récentes montrent une stabilisation des multiples autour de 9x à 10x l’EBITDA dans le mid-market européen, mais avec des écarts marqués selon les segments agro. Le maintien de tensions sur les coûts, le recul du bio et la montée des MDD modifient profondément les dynamiques de valorisation. Pour un dirigeant préparant une cession, ces évolutions rappellent l’importance de sécuriser les marges, renforcer le mix distribution et clarifier le positionnement afin de rester dans le haut de fourchette.

En pratique, demandez-vous :  

Question 1 : Votre marque est-elle réellement différenciante ?

Elle révèle votre capacité à éviter la guerre des prix, à résister aux MDD et à justifier un multiple supérieur.

Question 2 : Vos marges sont-elles soutenables dans le contexte actuel ?

Elle éclaire la résilience de votre modèle face à l’inflation, aux hausses de coûts et à la pression des centrales.

Question 3 : Votre mix de distribution réduit-il ou amplifie-t-il le risque ?

Elle montre si votre dépendance GMS fragilise la valorisation ou si un mix CHR/B2B/e-commerce renforce votre attractivité.

Question 4 : Votre outil industriel est-il perçu comme un atout ou un frein ?

Elle indique si un repreneur devra investir lourdement ou peut immédiatement monter en capacité, ce qui influence directement les multiples.

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François Joseph Viallon
François
Viallon
Partner Stratégie

François Joseph Viallon est cofondateur de Scale2Sell, où il accompagne des dirigeants dans leur passage à un nouveau palier de croissance jusqu’à la cession de leur entreprise.

Entrepreneur dans l’âme, il a fondé et dirigé StarDust, une société internationale spécialisée dans le test d’applications mobiles, qu’il a menée jusqu’à sa cession.Fort de cette expérience, il partage aujourd’hui les enseignements – succès comme erreurs – de son parcours pour aider d’autres dirigeants à structurer, valoriser et transmettre leur entreprise dans les meilleures conditions.

Il est également l'animateur du podcast Les interviews Scale2Sell et du programme d’accompagnement One Step Forward, pensé pour les dirigeants qui veulent anticiper et réussir leur transition.

François croit profondément à l’impact d’un collectif d’experts engagés, au service de dirigeants prêts à franchir une nouvelle étape.

François est papa de 2 garçons de 11 et 12 ans, il est basé à Marseille et en Haute-Savoie.

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